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Performance du Favori de Mme de Villedieu

Article paru dans l’ouvrage Madame de Villedieu et le théâtre, sous la dir. de E. Keller-Rahbé & N. Grande, Tübingen, Narr Verlag, « Biblio 17 », 184, 2009, p.147-159, suite au colloque international du GRAC (Lyon, 11-12 sept. 2008).

Résumé :

En reconstituant l’événement culturel et politique que fut le spectacle du Favori le soir de sa représentation à Versailles, nous proposons, dans cet article, d’éclairer la question de sa performance [1] sous trois angles :

– la performance réelle, lors de la représentation de la pièce dans les jardins de Versailles la nuit du 13 au 14 juin 1665 ;

la performance comme thème « dramatique » du Favori ;

– la performance de Mme de Villedieu dramaturge, à savoir la théâtralité de son écriture, qui, dans sa construction textuelle, suscite et réclame la performance pour prendre sens.

Il apparaît que la réussite de l’autrice tient à la valeur double de sa pièce, qui se révèle dans le contexte politique de l’époque, quelques mois après la condamnation de Nicolas Fouquet, victime de la disgrâce de Louis XIV : notre lecture tend à démontrer qu’il se joue une double performance, adressée à deux publics. Cette tragi-comédie, en mettant en scène deux clans de courtisans, s’adresse également à deux groupes de spectateurs dont les valeurs et les intérêts s’opposent. Et ce n’est pas une mince performance de la part de Mme de Villedieu de (ré)concilier ces deux groupes, en jouant habilement du contexte de la représentation et de ces personnages « médiateurs » que sont Don Alvar et Léonor – les plus proches peut-être des spectateurs moyens présents à la Cour ce soir-là, eux-même tiraillés par des désirs et des intérêts contradictoires, car en pleine mutation.


[1] Pour remettre en « performance » la pièce de Mme de Villedieu, nous avons suivi la méthode proposée par Florence Dupont (Aristote ou le vampire du théâtre occidental, Paris, Flammarion, 2007). Afin de « rethéâtraliser le théâtre», elle suggère de « retrouver la réalité historique d’[une] comédie, la reconstituer comme événement culturel, comprendre quels étaient ses fonctions et son but, étudier le contexte dans lequel étaient jouées ces pièces », quelle « raison spectaculaire » et non pas « narrative » construit ces pièces, et pour servir quel rituel, qu’il soit religieux, social, ludique ou politique. Pour ce faire, il est nécessaire de considérer le public comme « co-énonciateur » de la performance : ce n’est donc pas le texte qui fera sens, mais l’interaction entre acteurs et spectateurs.

En savoir plus sur la pièce et son autrice

En complément à cet article, j’ai mis à disposition une édition numérique du texte de Mme de Villedieu Description d’une des fêtes que le roi a faites à Versailles (1665), accessible ici.

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